Reconquérir Montréal

Texte paru dans Le Soleil, Québec, 26 mars 2009, p. 35

De plus en plus de Québécois remarquent que le français a de la difficulté à s’imposer à Montréal. C’est le cas de M. Réjean Labrie qui s’est exprimé ici le 23 mars. Plus de 30 ans après la loi 101, notre langue officielle n’est toujours pas aussi incontournable à Montréal que l’anglais à Toronto, Edmonton ou Calgary. Tout un chacun y va de ses propositions pour améliorer le sort du français dans notre métropole. Les plus récurrentes concernent la langue de travail dans les PME, l’obligation de faire des études collégiales en français pour les enfants d’immigrants, et le retour à l’affichage en français seulement.

En ce qui me concerne, trois domaines me semblent négligés. Le premier a trait à la langue que le gouvernement et ses institutions utilisent avec les immigrants qui ne connaissent pas le français. Savons-nous que si le premier contact s’est fait en anglais, il doit en être ainsi par la suite selon les règles établies? Une telle directive est aberrante.

Le second concerne la francisation des immigrants adultes. Si la scolarisation en français des enfants immigrants est le plus grand succès de la loi 101, la francisation des immigrants adultes est le point faible de notre politique linguistique (elle ne se trouve même pas dans la loi 101). Au rythme où nous accueillons les immigrants, il faudrait former chaque semaine une quinzaine de nouvelles classes par semaine. Or, le gouvernement ne procède que 4 fois par années! Durant l’attente qui dure en moyenne plus de 2 mois, de 40% à 45% des immigrants peuvent très bien se faire comprendre à Montréal, car ils connaissent déjà l’anglais.

Enfin, le troisième domaine concerne l’attitude des francophones eux-mêmes. Quand je vais à Montréal, je suis souvent témoin de conversations en anglais par des francophones dès qu’ils sont en présence d’une personne de « couleurs » ou ayant un accent. Très fiers de leur compétence en anglais, ces francophones ne se rendent pas compte qu’ils ratent à chaque fois une belle occasion de faire avancer la cause du français.

Michel Paillé, Québec