Le choix du cégep :
au-delà de la langue, la culture

---> Texte paru dans Le Soleil, Québec, samedi 28 août 2010, p. 32

Et la culture?
 
Je n’ai jamais compris comment une majorité de cégeps francophones laissent le président de leur Fédération, M. Gaëtan Boucher, donner son opinion personnelle (Le Soleil, 26 août 2010) favorable au libre choix de la langue d’enseignement, choix qui ne peut que favoriser la minorité de cégeps anglophones membres de la même Fédération.

Par ailleurs, M. Boucher n’en fait qu’une question de langue. De plus, il minimise les effets du libre choix en donnant de très petits chiffres. C’est un argument arbitraire qui amène la question suivante : à partir de combien de cégépiens le principe du libre choix ne tiendrait-il plus.

Le plus grave dans tout ça tient plutôt à la culture. Le corpus des cégeps en littérature et en histoire par exemple, n’est pas le même selon la langue d’enseignement. Par exemple, les cours d’histoire et de littérature donnés en anglais dans les cégeps anglophones, outre leurs contenus, transmettent une culture anglo-saxonne, voire «canadian». Pour s’imprégner de l’histoire particulière du Québec et de ses grands auteurs, c’est dans un cégep francophone où il faut s’inscrire.

Michel Paillé Québec

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Le PQ et les cégeps
 
---> Article paru dans Le Devoir du samedi 16 avril 2011, page B4
 
Ainsi donc, le Parti québécois pourrait adopter prochainement une résolution voulant que tout finissant du secondaire français doive poursuivre, le cas échéant, des études collégiales dans cette même langue. Sont nommément visés une fraction importante d'étudiants francophones et allophones — ces derniers comptant de nombreux immigrants parmi eux — qui s'inscrivent dans des cégeps où l'enseignement se donne en anglais. Il serait toutefois exagéré de considérer ce prolongement de la loi 101 comme le nec plus ultra du renforcement du statut du français au Québec.

Tenons pour acquis que la mesure péquiste vise aussi les immigrants qui, arrivant au Québec avec des études d'ordre secondaire dûment complétées, s'inscrivent au collégial dès leur arrivée. Mais qu'en est-il de la francisation de tous les autres immigrants, beaucoup plus nombreux ceux-là, qui cherchent du travail immédiatement? Que propose le PQ pour faire en sorte que le fameux «contrat moral» liant le Québec aux immigrants soit respecté? Selon ce «contrat», l'immigrant s'engagerait à apprendre le français, tandis que le gouvernement lui promet des cours dès son arrivée. «Contrat» bafoué par des abandons très élevés, par des objectifs plutôt faibles, par de longues semaines d'attente, par des ressources réduites alors que les niveaux d'immigration augmentent, etc. Dès lors, faut-il s'étonner que l'on ait recensé au Québec, en 2006, plus de 191 000 immigrants ne sachant toujours pas converser en français, dont 125 000 qui vivaient parmi nous depuis 10 ans ou plus?

Pour mettre les choses en perspective, remarquons qu'au cours de la période 1994-2003, 32 300 diplômés du secondaire en français se sont inscrits dans des cégeps anglophones, alors que nous avons accueilli ces mêmes années 181 000 immigrants ne connaissant pas le français (dont plus de 40 % pouvaient parler l'anglais). Bref, le PQ met-il sa priorité à la bonne place?

Michel Paillé
Québec